Saint Jean-Baptiste,
figure de l’éducateur chrétien
par
Vincent Dollmann
A côté de la figure de la Vierge Marie, le temps de
l’Avent nous propose de cheminer avec saint Jean-Baptiste le précurseur du
Christ. Il annonçait la venue imminente du Messie par son enseignement et son
témoignage de vie. Sa compétence était reconnue au point qu’on le confondait
avec le Christ. En même temps, il se retirait pour laisser le Christ agir. Dans
le métier d’éducateur, la compétence va de pair avec l’humilité. C’est une
nécessité pour le formateur, s’il veut être heureux dans son métier. C’est une
condition de réussite par rapport à ceux dont il a la charge.
1.
L’éducateur,
un chercheur de vérité
Être éducateur à la suite de Jean-Baptiste, c’est
être chercheur de la vérité ; c’est être capable de découvrir l’initiative
et la présence de Dieu. En fait, c’est toujours Dieu qui fait le premier pas,
c’est Lui qui est venu à Jean Baptiste à travers Jésus.
Quand Jean-Baptiste voit venir Jésus vers lui, il
dira : « Voici l’Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde ».
Il accueille par avance tout le mystère de Jésus qui vivra la fidélité au Dieu
Père jusque dans la mort et y ouvrira ainsi une brèche pour permettre aux
hommes d’accéder au pardon et à la vie de Dieu.
Le retable de Matthias Grünewald que nous pouvons
admirer au musée Unterlinden de Colmar fait de Jean-Baptiste le contemporain de
la crucifixion. L’artiste l’a présenté pointant de son doigt le Christ en
croix, un Christ souffrant, portant sur lui toute la souffrance et le péché des
hommes et manifestant ainsi l’amour infini de Dieu qui rejoint l’humanité et
lui offre le salut.
2. L’éducateur,
un enseignant
Comment Jean-Baptiste,a-t-il pu par avance
reconnaître en Jésus l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde, le Fils de
Dieu qui allait offrir sa vie ?
Pour Jean-Baptiste, rendre compte de ce qu’il a vu,
n’est pas une simple affaire de sensibilité ou d’émotion ; il met en œuvre
toutes les capacités humaines. Jean-Baptiste l’ascète, n’est pas homme à se
laisser guider par l’éphémère de la sensibilité humaine ou de l’opinion
publique. Son témoignage est réfléchi, éclairé par la Parole de Dieu.
La désignation qu’il utilise pour le Christ,
‘l’Agneau de Dieu’, révèle sa grande culture et sa profonde connaissance des
Ecritures. Imprégné par la Parole de Dieu, Jean Baptiste a su dépasser les
apparences et découvrir dans l’homme Jésus la présence du Dieu vivant qui veut
réconcilier tous les hommes avec lui.
Le formateur est d’abord un enseignant. Jean
lui-même transmet un message clair et cohérent qui est reçu par la diversité
des personnes qui l’écoutent, les soldats romains, comme les pharisiens.
Cet enseignement a le souci de la vérité totale qui
ne peut être approchée que dans l’articulation entre la raison et la foi. Si la
raison ne s’ouvre pas à la foi, elle en arrive à s’autolimiter et au fond à
prendre une position idéologique. Et si la foi ne s’ouvre pas à la raison, elle
se réduit à une soumission servile à des commandements ou à un attachement
purement affectif à Dieu ; et elle ne rend ainsi pas compte de
l’incarnation du Fils de Dieu qui a assumé notre raison humaine. L’Encyclique Lumen Fideide 2013 parle d’une
interaction féconde entre la raison et la foi (n.32).
3.
L’éducateur, un témoin
On pense généralement qu’être témoin, c’est être vu
par les autres, devenir une vedette, une star. Jean Baptiste au contraire nous
signifie que le témoin est celui qui donne à voir, qui révèle la présence du
Christ.
Saint Augustin dans son homélie sur la nativité de
saint Jean Baptiste, dira : « Il est difficile de distinguer la
parole de la voix, et c’est pourquoi on a pris Jean pour le Christ. On a pris
la voix pour la parole ; mais la voix s’est fait connaître afin de ne pas
faire obstacle à la Parole. »
Ce cheminement de Jean Baptiste est d’autant plus
remarquable que Jésus était son cousin voire un de ses disciples ; il
parle de Jésus comme de celui qui est derrière lui, qui le suit.
Jean Baptiste reconnaît qu’en réalité, il ne le
connaissait pas, qu’il avait à faire un chemin de conversion pour le connaître
réellement. Il s’agit là d’un pas décisif, d’un acte de foi libre et responsable
qui place le Christ au centre de sa vie. Celui qui ose le pas, voit sa vie
transformée comme celle de Jean Baptiste qui ne craignait alors plus aucun
obstacle, ni la méchanceté des hommes, ni même la mort.
4. Les
conditions pour devenir un éducateur au service de la vérité du Christ
a) Il
s’agit d’abord d’accepter des décentrements
-
Par rapport à soi
Homme de culture, pétri par l’Ecriture-Sainte,
Jean-Baptiste a au début de son cheminement mis une grande confiance dans
l’intelligence humaine. C’était sa période
de l’homo faber, de l’homme misant
sur ses propres facultés.
-
Par rapport aux
idéologies
Saint Jean-Baptiste est également entré dans le
mouvement des baptistes qui invitaient à la conversion pour préparer la venue
du Messie. Le baptême d’eau était le signe visible de cette préparation. De
plus, un groupe de disciples allait se former autour de lui. Ce succès pouvait
amener le précurseur à se fixer sur une vision précise de la venue du Messie.
L’évangéliste saint Matthieu donne le contenu de ses premières
prédications : « Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres,
tout arbre qui ne produit pas de bon fruit va être coupé et jeté au feu… Il
tient dans sa main la pelle à vanner… ».
Jean-Baptiste pouvait être tenté de croire qu’il
changerait la société. Il pouvait en arriver à vouloir prendre la place du
Messie, d’autant plus que le peuple s’interrogeait sur son identité. C’était
pour Jean, l’étape del’idéologie.
A ce stade, on se dit : « J’ai
l’intelligence, la jeunesse. Je peux y arriver. Dieu m’aidera ; mais il a
surtout de la chance de m’avoir et de pouvoir travailler avec moi ».
b) Il
s’agit surtout de s’ouvrir à l’humilité
Mais voici qu’en prison, saint Jean-Baptiste
s’interroge sur Jésus : « Est-il celui qui doit venir ou devons-nous
en attendre un autre ? »
La manière dont Jésus remplissait sa mission ne
correspondait pas à la sévérité de ses avertissements.
Là où Jean-Baptiste annonçait la justice divine,
Jésus proclamait sa miséricorde. Jean-Baptiste était mis à l’épreuve sur le
contenu même de sa prédication, sur sa propre mission. Ce fut la nuit de la foi
pour lui. Sa foi était éprouvée.
Jean va ainsi envoyer une délégation. Il ne veut pas
contester Jésus, ni même lui demander des explications, mais simplement trouver
lumière et force. Il demande indirectement à Jésus de l’aider à rester fidèle à
sa mission. Et Jésus n’hésite pas à répondre à cette requête en lui donnant les
signes attendus : « Allez rapporter à Jean ce que vous entendez
et voyez ».
Sa pauvreté de cœur va être récompensée. En se
tournant humblement vers le Christ, il va pouvoir recevoir de Lui, lumière et
force. Saint Jean-Baptiste va pouvoir poursuivre sa mission de précurseur, non
simplement par la parole mais par le témoignage de sa vie, jusqu’à se conformer
au Christ par sa propre mort.
Jean-Baptiste invite l’éducateur à articuler le
travail intellectuel à la prière pour maintenir sa mission dans sa finalité
ultime qu’est la vérité. Ensemble, prière et travail intellectuel permettent à
l’éducateur de s’ouvrir à l’Esprit Saint envoyé par Jésus
le jour de la Pentecôte ; comme une langue de feu, il éclaire les
intelligences et comme un souffle il fortifie les cœurs.
Si saint Jean Baptiste peut être un modèle pour
l’éducateur chrétien, il est également un soutien aujourd’hui et nous pouvons
également lui demander sa prière pour entrer pleinement dans la vérité du
Christ, Maître et Seigneur de l’Univers.
+ Vincent
Dollmann
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